En proie à la guerre qui oppose l’armée congolaise aux rebelles du M23 depuis la reprise des combats en 2021, l’est de la République démocratique du Congo (RDC) est aussi le théâtre de violences sexuelles dont l’augmentation est source d’inquiétude pour Médecins sans frontières.
En effet, dans un rapport publié le 30 septembre, l’organisation non gouvernementale indique avoir soigné pas moins de 25 000 victimes de violences sexuelles pour la seule année 2023. Et pour l’année 2024, la situation ne semble guère s’améliorer puisque, au cours des cinq premiers mois, elle comptabilise déjà 17 000 victimes.
Une situation d’autant plus préoccupante que le ratio est particulièrement élevé, comparativement aux années précédentes où la moyenne annuelle tournait autour de 10 000 victimes. Toujours selon l’ONG internationale, qui a son siège à Genève, en Suisse, la plupart des victimes viennent du Nord-Kivu, où les combats font rage entre les Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) et les rebelles du M23 soutenus, selon plusieurs sources, par le Rwanda voisin.
Ne pas abandonner les Congolaises
Dans cette triste situation, les femmes et les filles constituent 98 % des victimes, notamment dans les camps de déplacés où intervient l’ONG médicale internationale, qui fait cas de 18 000 cas de femmes violées.
Des chiffres qui font froid dans le dos en même temps qu’ils donnent le tournis et qui sont symptomatiques de la gravité de la situation dans un contexte d’insécurité généralisée dans cette partie de la RDC.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’organisation non gouvernementale Médecins sans frontières est dans son rôle. En tirant la sonnette d’alarme, elle vise à attirer l’attention sur un phénomène aussi pervers qu’il est potentiellement destructeur pour la société en général et les victimes en particulier, qui portent parfois à vie les stigmates d’une souillure indélébile.
La situation est d’autant plus préoccupante que les deux tiers des agressions, selon les chiffres de l’ONG, se déroulent sous la menace d’une arme. De quoi se convaincre que cette situation malheureuse est largement favorisée par la situation sécuritaire délétère qui prévaut dans cette région du pays où l’État a du mal à exercer son autorité.
La situation doit d’autant plus interpeller que ces viols et autres actes de violences sexuelles ne sont pas sans conséquences sur les populations, qui ne savent plus à quel sauveur se vouer ni d’où viendra leur salut.
Toujours est-il qu’au-delà des maladies sexuellement transmissibles et du VIH auquel de nombreuses victimes ont été testées positives, les grossesses non désirées, les avortements et les actes de rejet de certaines victimes par leurs familles restent des sujets de préoccupation majeurs nécessitant des prises en charge médicales et psychologiques adéquates.
La question qui se pose est de savoir si ce cri d’alarme de l’ONG Médecins sans frontières sera entendu.
Des abus d’une autre époque
C’est dire si la communauté internationale ne doit pas abandonner la RDC à son triste sort, mais plutôt l’aider à trouver une solution à la crise. Il est d’autant plus important que ces crimes ne restent pas impunis que ce sont des vies qui se trouvent brisées du jour au lendemain.
Non seulement ces viols sont vécus comme une véritable humiliation par ces pauvres femmes et jeunes filles, mais leurs séquelles laissent aussi parfois des traces indélébiles difficiles à supporter. Autant dire qu’il y a véritablement nécessité d’agir.
Pour sa part, l’organisation médicale est en train de jouer sa partition en apportant assistance et secours à ces populations en détresse. Il appartient aux pouvoirs publics de prendre par les cornes le taureau de ce fléau qui, au-delà des questions sanitaires et sécuritaires, touche aussi à la dignité humaine, à l’effet d’y trouver une solution.
Quant à la communauté internationale, elle est davantage appelée à peser de tout son poids pour trouver une solution négociée à ce conflit armé qui brûle à grand feu le pays [du président] Félix Tshisekedi et qui est en train de l’entraîner petit à petit dans un gouffre sans fin. Cela est un impératif dans une RDC aujourd’hui en quête de stabilité dans la partie orientale du pays, mais dont la société a besoin de garder toutes ses valeurs d’humanisme.
En tout état de cause, la guerre ne saurait justifier ces abus d’une autre époque sur des femmes et des jeunes filles qui ne demandent qu’à vivre dans la paix, la sécurité et la dignité d’épouses, de mères et de sœurs.