La fixation des frais de participation à l’examen d’État, édition 2023-2024, à 130 000 FC, par le gouverneur militaire ad intérim du Nord-Kivu, le général major Peter Chirimwami, a provoqué un tollé dans le chef de plusieurs habitants de cette province. Pour nombreux acteurs, tant politiques que ceux de la société civile, il est inadmissible que ces frais soient revus à la hausse, comparativement à ceux de l’année passée, soit 94 000 FC, alors que la province fait face à la guerre d’agression lui imposée par le. Rwanda, sous couvert du M23.
« C’est beaucoup d’argent qu’ils demandent. Pourquoi ne pas exonérer les parents du Nord-Kivu du paiement de ces frais? Que le gouvernement nous aide à alléger cette autre lourde tâche aux parents, sinon, de nombreux finalistes ne vont pas passer cet examen », s’exclame un parent.
« Qu’on nous aide en tout cas parce que les 130 000 FC exigés, c’est vraiment une somme exorbitante. Comment un parent qui a, par exemple, 2, 3, 4 ou 5 enfants va réussir à réunir tout ce montant en cette période de guerre ? Les déplacés sont également nombreux. Tous, on ne vivait que des activités qui se déroulaient au village. Maintenant, plus rien ne vas là bas, suite à la guerre, où allons-nous trouver cet argent ? Et les gens qui sont en déplacement ici, et même nous, qui habitons la ville, nous parcourons presque la même situation de vulnérabilité », plaide Kasoki Maliro, mère d’une élève de Goma.
Depuis la reprise des affrontements entre la coalition FARDC-Wazalendo et les rebelles du M23/RDF, dans le territoire de Masisi, notamment, de nombreux élèves, parmi eux, des finalistes de secondaire ont été contraints de fuir leurs milieux. Ils se retrouvent, actuellement, ainsi que leurs parents, dans différents sites des déplacés et même dans des familles d’accueil à Goma et ses environs. Ils s’ajoutent à beaucoup d’autres ayant fui la guerre dans les territoires de Rutshuru et de Nyiragongo, qui se retrouvent également en difficulté à Goma et environs.
« C’est comme si on était confiné. Difficile, aujourd’hui d’aller à Rutshuru et à Masisi, parce que toutes les voies sont coupées par le M23. Si le gouvernement peut nous venir en aide, tant mieux. Parce que toutes les activités sont bloquées, à cause de la guerre. Il n’y a pas d’argent. Qu’on décrète carrément une année blanche pour ces élèves du Nord-Kivu. Nous manquons même la prime et quand on nous demande de payer 130 000 FC en cette période, c’est vraiment compliqué », explique cet autre parent d’élèves.
Du côté du gouvernement provincial du Nord-Kivu, on essaye de s’expliquer. Selon Prisca Luanda, conseillère principale du gouverneur militaire, en charge de l’éducation, la fixation de ces frais, à 130 000 FC a été faite de commun accord avec tous les membres du comité provincial de l’EPST, qui regroupe en son sein les représentants des parents, des enseignants, de la société civile ainsi que des autorités scolaires. Pour elle, la majoration de ces frais, qui prennent en compte certaines charges liées à la passation de l’EXETAT, est due notamment à la hausse du taux du dollars américains, qui est passé de 2 000 FC en 2021 à 2 800 FC en 2024.
« Je sais qu’au Nord-Kivu, nous sommes une province en guerre. Je sais en plus de cela que nous avons beaucoup de déplacés, comme ça a été le cas de l’année passée. D’ailleurs, nous avions transmis, en son temps, la liste d’élèves déplacés qui sont dans les provinces éducationnelles Nord-Kivu 1, Nord-Kivu 2 et Nord-Kivu 3. La liste avait été transmise au niveau de Kinshasa, au niveau du ministère de l’EPST et au niveau du ministère des actions humanitaires, pour voir si on peut exonérer ces élèves déplacés à ne pas payer ces frais. Mais, jusqu’à la passation de l’examen d’État, nous n’avons pas reçu une réponse favorable par rapport à l’exonération de ces frais pour les élèves déplacés », a réagi Prisca Luanda, conseillère principale de l’autorité provinciale, en charge de l’éducation.
Et d’ajouter :
« Cette année, nous allons faire ce même exercice, parce que j’ai dit à tous les services techniques de préparer les listes des enfants finalistes qui sont en déplacement et nous allons encore transmettre ces listes puisque la province n’est pas compétente pour exonérer les finalistes à ne pas payer les frais de participation à l’examen d’État. C’est de la compétence du gouvernement central qui peut nous donner l’ordre, aujourd’hui, de ne pas faire payer ces frais-là ».
L’année scolaire dernière, en ce qui concerne la province du Nord-Kivu, les frais de participation à l’EXETAT étaient fixés à 94 000 FC. Certaines personnes de bonne foi, à l’instar du Dr Denis Mukwege, avaient payé pour quelques élèves finalistes déplacés, en provenance notamment des territoires de Rutshuru, Nyiragongo et Masisi.
Selon le calendrier scolaire, publié par le ministère de l’EPST, les épreuves hors-session de l’EXETAT se dérouleront du 6 au 18 mai 2024 alors que la session ordinaire interviendra du 24 au 27 juin 2024.
Jonathan Kombi, à Goma