« Le but de l’ONU n’est pas d’emmener l’humanité au paradis, mais de la protéger de l’enfer », a rappelé le Président congolais Félix Tshisekedi dans son discours, recourant à cette célèbre citation de Dag Hammarskjöld, ancien Secrétaire général de l’ONU, afin de souligner l’importance cruciale du multilatéralisme pour répondre aux menaces communes, protéger notre planète et renforcer la société civile, ainsi que les droits humains.
Il a ainsi loué les efforts de coopération promus par le Pacte pour l’avenir, adopté dimanche 23 septembre par les Etats membres des Nations Unies, autant que par le Pacte mondial numérique qu’il a décrit comme un pilier essentiel dans « notre quête d’un avenir prospère, au cœur de la quatrième révolution industrielle ».
La réponse à l’essor de ces technologies numériques incontournables implique à ses yeux des réformes globales, une réévaluation de l’architecture financière et un financement adéquat.
Des partenariats pour le maillage de l’Afrique
C’est pourquoi, a-t-il souligné, la République démocratique du Congo aspire à attirer des investissements pour développer la connectivité en Afrique et appelle à la coopération des partenaires multilatéraux et des opérateurs de télécommunications, avec à la clé un transfert des connaissances.
Au nombre des projets essentiels, le Président congolais a mentionné l’accompagnement au processus de maillage du pays, solution prometteuse pour relier le sud et le nord de l’Afrique et relier l’océan Indien à l’Atlantique, qui comprend la formation de partenariats viables autour du projet hydroélectrique Grand Inga, réponse à la demande énergétique croissante du pays.
Le Président Tshisekedi a aussi jugé essentiel de « renforcer la traçabilité des minerais stratégiques, indispensables aux équipements technologiques, afin d’assurer une exploitation responsable et durable de nos ressources ».
Il a également décrit comme une priorité de remédier à la déconnexion entre une population jeune en forte croissance et le marché de l’emploi, en leur fournissant les compétences nécessaires à leur intégration par des investissements dans l’éducation, notamment dans les domaines des STEM, (science, technologie, ingénierie et mathématiques), et en créant un environnement propice à l’innovation.
Une crise humanitaire sans précédent dans l’Est du pays
Le Président congolais a aussi évoqué la situation dans l’Est du pays, déclarant que « la résurgence du groupe terroriste M23, soutenu par le Rwanda, a provoqué une crise humanitaire sans précédent », avec près de 7 millions de déplacés internes, et appelé « la communauté internationale à imposer des sanctions ciblées contre le Rwanda en raison de son rôle déstabilisateur ».
« Nous exigeons le retrait immédiat et inconditionnel des troupes rwandaises de notre territoire », a-t-il déclaré. « Bien que les récentes initiatives diplomatiques, telles que les pourparlers de Luanda, soient encourageantes, elles ne doivent aucunement occulter l’urgence de cette action essentielle ».
Il a en outre réaffirmé l’engagement de son gouvernement à poursuivre la mise en œuvre du Programme de désarmement, démobilisation, relèvement communautaire et stabilisation pour désarmer, démobiliser et réintégrer les combattants en leur offrant des perspectives économiques viables et durables. Il a aussi souligné la priorité donnée au rapatriement de combattants étrangers, bénéfique à une transition après le départ de la Mission de paix des Nations Unies (MONUSCO) du pays.
La valorisation des forêts tropicales
Citant les réalisations déjà atteintes, comme la gratuité de l’enseignement de base, qui assure la scolarité de 4 millions d’enfants, le renforcement de la protection sociale, et les avancées en faveur de l’industrialisation, le Président Tshisekedi a néanmoins souligné que la RDC, en situation de conflit, ne pourra pas atteindre les objectifs de développement durables d’ici 2030, qui nécessiteraient des investissements annuels de 32 milliards de dollars.
Mais il s’est félicité de mesures de valorisation des forets tropicales, et du tournant majeur franchi à Bali en novembre 2022 avec l’adoption de la Déclaration conjointe sur la coopération dans ce domaine signée par le Brésil, l’Indonésie et la RDC. Une avancée qui, selon lui, témoigne d’une volonté politique collective d’utiliser les forêts comme levier de développement durable.
Les bassins amazonien, congolais et de Bornéo-Mékong abritent plus de 80% des forêts tropicales et jouent un rôle crucial dans la lutte contre le changement climatique, a-t-il rappelé. Il est donc impératif que l’amélioration des conditions socio-économiques des communautés locales, qui jouent un rôle clé dans la préservation de ces forêts, soit placée au centre des priorités de la gouvernance mondiale.
Deux sièges permanents pour l’Afrique
Enfin, le Président Tshisekedi a appelé l’ONU à prouver sa capacité à s’adapter aux évolutions contemporaines et à redynamiser le multilatéralisme. Il a réitéré avec fermeté au nom de l’ensemble des pays africains sa requête de création de deux sièges permanents dotés de droits de veto au Conseil de Sécurité pour les pays africains.
« Il s’agit là d’une question de justice pour un continent dont le rôle dans les affaires internationales ne cesse de croître », a-t-il affirmé.