Crédit photo, LASTEX/INNOCENT BUCHU
Légende image, Dans un salon aménagé, des vitrines alignées abritent diverses pierres précieuses et minerais issus des profondeurs de la RDC.Article informationAuthor, Innocent BUCHURole, BBC AfriqueReporting from Goma, RDC
24 septembre 2024
En République démocratique du Congo, un musée géologique privé, LASTEX (Laguer’s Stones Exposition) met en lumière les trésors cachés du sous-sol congolais. Installé à Goma, dans l’est du pays, une région en proie aux conflits armés. Le musée LASTEX est le fruit de quatre décennies de dur labeur de son fondateur, Laguer Masirika Lufungulo.
Dans un salon aménagé, des vitrines alignées abritent diverses pierres précieuses et minerais issus des profondeurs de la RDC. Sur les murs, des tableaux incrustés de pierres rares côtoient des bijoux fabriqués à partir de ces ressources naturelles. Un avertissement s’impose, ici, il est strictement interdit de toucher.
Le musée expose un large éventail de minéraux, parmi lesquels le corindon de saphir, la tourmaline et les tristement célèbres « 3T », cassitérite (étain), wolframite (tungstène) et coltan (tantale), qui attisent les conflits dans l’est du Congo. Ce musée permet de mieux comprendre pourquoi la RDC est souvent qualifiée de « scandale géologique ». Pourtant, nombreux sont les Congolais qui ignorent les richesses de leur propre sous-sol.
‘’L’ignorance de nos compatriotes quant à la richesse minérale de la RDC est insupportable. Cela m’a motivé à créer ce musée, pour qu’il soit utile aux générations futures et qu’il contribue au développement de notre pays’’, explique Laguer Masirika Lufungulo, gemmologue passionné, qui a commencé sa collection en 1984 à Bukavu.
Laguer a parcouru une grande partie du territoire congolais, ramassant, lors de ses expéditions dans les zones minières, des spécimens de pierres précieuses. Il s’efforçait de mener de petites études pour mieux comprendre les mystères des minéraux. Aujourd’hui, dans son musée, il prend plaisir à partager ses connaissances avec les visiteurs, en expliquant chaque pierre et en répondant à leurs questions, créant ainsi une ambiance conviviale.
Un musée qui impressionne les visiteurs
Crédit photo, LASTEX/INNOCENT BUCHU
Légende image, Les visiteurs sont souvent émerveillés par ce qu’ils découvrent
Les visiteurs sont souvent émerveillés par ce qu’ils découvrent. « On se rend compte que le Congo regorge de richesses dont nous-mêmes, Congolais, ignorions l’existence », confie Gloria Ramazi, visiblement émue de découvrir à l’âge adulte les trésors minéraux du pays.
De son côté, Forest Mukulumpa, 28 ans, a pu voir pour la première fois la pierre associée à son signe astrologique : ‘’J’ai adoré l’améthyste, car je suis verseau. Ça correspond à ma date de naissance’’, explique-t-il. Forest laisse désormais une image à tous ces noms qu’il a étudiés à l’école.
Malgré ces innombrables ressources, la RDC demeure en proie à des conflits et un sous-développement chronique depuis plus de trois décennies. Pour les autorités, le pays est victime de ses propres richesses naturelles. De nombreux rapports, notamment du Groupe d’experts de l’ONU, accusent le Rwanda et l’Ouganda d’être impliqués dans le trafic illégal de minerais congolais. Et de déstabiliser la paix pour les mêmes raisons.
Laguer Masirika Lufungulo, qui a appris la gestion muséale en autodidacte, espère une collaboration avec les autorités provinciales, mais, pour l’instant, aucun partenariat concret n’a vu le jour. Malgré cela, il n’a pas attendu de soutien extérieur pour concrétiser son projet.
Un projet qui a besoin de soutien
Crédit photo, LASTEX/INNOCENT BUCHU
Légende image, Laguer Lufungulo Masirika, explique aux visiteurs comment les minerais se retrouvent dans le musée
Fier de ses accomplissements, Laguer sait néanmoins que le chemin reste long. ‘’Tout est confiné ici’’, déplore-t-il en évoquant l’espace restreint de son musée. Il précise que de nombreuses autres pièces de sa collection sont encore stockées dans des dépôts ou exposées à l’extérieur, faute de place.
Il espère un jour obtenir un espace plus grand pour mieux mettre en valeur les minéraux de la RD.Congo. Il fait également face à des défis sécuritaires, tant pour le musée que pour ses visiteurs, et compte sur l’aide du gouvernement pour assurer la protection de cet espace riche en culture, en histoire et en minerais.
La collecte de ces pierres n’a pas été une tâche aisée, confie Laguer. Il a dû voyager souvent dans des conditions difficiles à travers ce vaste pays. Les contraintes économiques sont aussi un défi de taille.
‘’Pour obtenir un spécimen, il faut l’acheter, et parfois vous tombez sur quelqu’un qui connaît lui aussi la valeur des minéraux, et là, il faut négocier à un prix très élevé’’, raconte-t-il.
Le professeur associé Innocent Badriyo, enseignant-chercheur en géologie à l’Université de Goma, salue le travail de Laguer et estime qu’il mérite un soutien. ‘’C’est la première fois qu’un musée géologique est accessible au grand public’’, rappelle-t-il, tandis que l’Université de Goma dispose uniquement d’un laboratoire réservé à ses étudiants en géologie.
Avec ce musée géologique désormais ouvert au public, les Congolais ont enfin la possibilité de mieux comprendre les richesses qui se trouvent sous leurs pieds.
‘’Très fier… Ce n’est pas facile, mais nous tenons bon. Nous allons laisser à nos futures générations un bel espace de recherche pour le développement du pays’’, conclut Laguer Masirika Lufungulo.
Crédit photo, LASTEX/INNOCENT BUCHU
Légende image, Avec ce musée géologique désormais ouvert au public, les Congolais ont enfin la possibilité de mieux comprendre les richesses qui se trouvent sous leurs pieds.
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